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Une pêcherie véritablement neutre en plastique

La pêcherie de thon des Açores montre l’exemple en nettoyant l’océan et en retirant plus de 1000 fois plus de plastique de l’océan que ce qu’elle-même engendre

Lors de l’inauguration du projet Plastic Neutral en 2021, la pêche à la canne des Açores est devenue la première pêcherie “plastic-positive” au monde. Cette année, la flotte de canneurs des Açores a de nouveau relevé le défi et a non seulement réussi à maintenir son statut de “plastic-positive”, mais l’a fait avec 56 % de la flotte participant à la compétition de 2022, collectant 620,65 kg de plastique marin, retirant ainsi 1 241 fois plus de plastique que la quantité que cette pêcherie a perdu à la suite de ses propres opérations.

La pollution plastique est une menace énorme pour nos océans : le plastique salit nos côtes, étrangle les animaux, certains en voie de disparition, et menace les habitats marins en danger. Lorsqu’il est réduit en morceaux suffisamment petits, le plastique océanique est ingéré par les animaux sauvages et s’accumule le long de la chaîne alimentaire jusqu’à l’homme. Au total, environ 14 millions de tonnes de plastique sont rejetées en mer chaque année et la nature du plastique fait qu’il peut prendre des décennies, voir des siècles, pour se dégrader complètement. Par conséquent, la quasi-totalité du plastique jamais créé existe encore quelque part aujourd’hui, même dans des environnements dynamiques comme l’océan. Lorsqu’elles sont abandonnées en mer, les matières plastiques peuvent dériver sur des milliers de kilomètres jusqu’à ce qu’elles soient retirées. Cela signifie que, en plus de propager des maladies et d’envahir notre environnement, elles pénètrent régulièrement dans les eaux de ceux qui ne polluent pas.

“Les océans sont en crise en raison du changement climatique, de la surpêche, de la pollution et de la destruction des habitats marins. Ces problèmes sont causés par les actions humaines et nous sommes les seuls à pouvoir inverser cette situation. Chacun est responsable et chaque action, même petite, est fondamentale pour créer le changement.”

– Alexandra C.S. Garcia Guerreiro
Directrice régionale de la pêche, Açores

Nous n’en parlons pas assez, mais les engins de pêche représentent une part importante du plastique océanique et, pire encore, sont les plus nocifs pour l’environnement marin. Lorsqu’ils sont abandonnés, perdus ou rejetés en mer, les engins de pêche deviennent connus sous le nom d'”engins fantômes”, dérivant sans but en mer, piégeant les animaux et s’accrochant aux habitats sensibles jusqu’à ce qu’ils soient retirés. Un rapport révolutionnaire, publié en 2019 a révélé l’ampleur du problème : 86 % des grands plastiques qui composent le Great Pacific Garbage Patch sont des filets de pêche, et 85 % de la pollution plastique sur les monts sous-marins, les dorsales océaniques et les fonds marins sont des équipements de pêche. Les bouées représentent à elles seules 58 % de tous les grands plastiques flottant à la surface de l’océan.

Face à ce problème, en 2019, la Fondation internationale de la Pêche à la Canne (IPNLF), le Programme d’observation des pêches des Açores (POPA) et l’Institut de recherche marine (IMAR) ont commencé à travailler ensemble pour rechercher la quantité de plastique et d’engins de pêche que la pêche au thon à la canne perd chaque année. Sur la base des informations recueillies par les observateurs des pêches du POPA, ils ont découvert que la pêche au thon “un par un” ne crée que très peu de pollution plastique, en fait, il s’agit d’une quantité négligeable en poids par rapport à la pêche industrielle.

Ces résultats montrent que l’ensemble de la flotte de pêche au thon ne produit que 0,5 kg de déchets liés aux engins de pêche par an.

En collaboration avec l’Observatoire maritime des Açores (OMA), POPA, IMAR, Associação de Produtores de Atum e Similares dos Açores (APASA), Federação das Pescas dos Açores (FPA), et financé par Fish4Ever et Biocoop France, le projet Plastic Neutral a été lancé et trois concours annuels d’enlèvement d’engins fantômes seront coordonnés aux Açores entre 2021 et 2023. Ces concours consistent à travailler en collaboration avec la flotte régionale de canneurs des Açores pour retirer les engins fantômes flottants rencontrés en mer, les débarquer à terre et les éliminer en toute sécurité par le biais des systèmes locaux de gestion des déchets. L’objectif final de ces concours est de faire en sorte que la flotte de canneurs ramasse une quantité totale d’engins fantômes en poids qui dépasse de loin ce que la flotte des canneurs perd.

Lors du concours d’enlèvement des engins fantômes de cette année, sur les 735 kg de déchets marins collectés, il a été confirmé que 620,65 kg de cette quantité étaient des engins de pêche.

Les quatre types d’articles liés aux engins de pêche qui ont été collectés sont les suivants :

– Bouées (134,80 kg)
– Câbles en nylon (253,35 kg)
– Réflecteurs de pêche (118 Kg)
– Filets multifilaments en nylon (114,5 kg).

Grâce à ces efforts, la pêche à la canne a atteint le statut de neutralité plastique pour la saison de pêche de 2022.

Par rapport à la compétition de 2021, qui s’est déroulée pendant la fin de la pandémie, celle de 2022 s’est déroulée avec très peu de difficulté. Intégrant les points d’amélioration de la compétition précédente, la compétition de cette année a également vu un plus grand nombre de navires participants et une quantité beaucoup plus importante d’engins fantômes récupérés. Le succès de la flotte des Açores va bien au-delà de la neutralité plastique et, alors que cette série de compétitions approche sa dernière édition en 2023, l’IPNLF ne doute pas que nous puissions faire en sorte que la compétition finale soit la plus marquante des trois.

À propos du projet, Carla Damaso, Presidente da Direcçao OMA déclare:

“Cette deuxième année du concours a montré le dévouement des pêcheurs de thon açoréens et leur rôle important dans l’amélioration des pratiques environnementales en mer et dans la lutte contre les problèmes environnementaux tels que la pêche fantôme. Le concours sensibilise aux problèmes de la pêche fantôme et il est clair que nous avons maintenant développé un modèle de collecte des engins de pêche en mer qui peut s’étendre avec succès à l’ensemble de la flotte thonière des Açores et être reproduit par d’autres flottes dans le monde entier”.

Charles Redfern, directeur général de Fish4Ever, déclare:

“Il est essentiel que nous soutenions des initiatives telles que ce concours afin de protéger la vie marine et les habitats océaniques des menaces de la pollution plastique. En atteignant le statut de neutralité plastique pendant deux années consécutives, la pêche à la canne des Açores a montré qu’elle avait la plus faible empreinte plastique de toutes les pêcheries du monde. Nous pourrions faire tellement plus en termes d’impact positif et de soutien à des pêcheries exemplaires comme celle-ci si nous étions en mesure d’obtenir plus de traction sur le marché où les produits finis se vendent. Il est donc très utile que des consommateurs proactifs et surtout des détaillants soutiennent ces belles histoires”.

Traduction de l’article original de l’IPNLF